Projet scientifique

Nouvelles méthodes pour les territoires contemporains
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Cet axe est né de la volonté de capitaliser nos expérimentations méthodologiques passées et futures.
Comment approcher, analyser et décrire la ville aujourd’hui ? Notre hypothèse de travail est que la ville est, dans son essence, un objet interdisciplinaire, impossible à approcher avec un seul regard. A partir de là la méthode pour construire un dialogue et un travail interdisciplinaire devient elle même un objet scientifique.
Le but de cet axe est d’entamer un travail de réflexion systématique sur les méthodes et sur les dispositifs d’enquête utilisés par les membres de l’équipe lors de leurs recherches. Cela nous permettra de « capitaliser » nos expériences et nos connaissances en tant qu’ équipe de recherche, non seulement sur le plan des contenus, mais aussi dans le domaine méthodologique.

Problématique

La création de cet axe de recherche est liée au double constat de la complexité des territoires contemporains et de l’insuffisance des paradigmes théoriques et méthodologiques disciplinaires, dans leur acception classique « pure », face à la mondialisation et à ses facettes multiples, contradictoires et mouvantes. Nous pensons que de tels objets, pour être cernés, analysés et interprétés, nécessitent un renouveau méthodologique qui se joue à la fois à l’intérieur de chacune de nos disciplines d’appartenance (l’anthropologie, l’architecture, l’urbanisme, la sociologie…) et à la fois dans le dialogue étroit entre ces disciplines. Plus précisément, il s’agit, d’une part, de garder la spécificité des différentes approches méthodologiques disciplinaires tout en ayant « le courage » de les réinterpréter pour les rendre opérationnelles face aux défi de la complexité des mondes contemporains, et, de l’autre, d’embrasser une perspective méthodologique interdisciplinaire. Perspective enrichissante car elle pose l’objet de recherche en tout premier plan et l’aborde, ensuite, par une pluralité de points de vue et de dispositifs d’enquête.

Ainsi, dans le cadre de notre parti pris scientifique concernant l’anthropologie de la ville, par exemple, nous souhaitons contribuer à la recherche de solutions aux problèmes méthodologiques posés, déjà à l’époque de l’Ecole de Chicago, par le décalage existant entre l’ambition de cerner la ville en tant que totalité et les dispositifs d’enquête propres à l’anthropologie, conçus au départ pour l’étude de petites communautés (Rossi, 2003). Pour ce faire, nous entendons approfondir, affiner, systématiser et valoriser les acquis méthodologiques issus de certaines de nos expériences de recherche récentes, à savoir, entre autres, la pratique de terrain en équipe (et non pas en solo, comme le prescrit la tradition malinowskienne) (Ulf, 1983), l’utilisation du dessin sur fond plan lors des entretiens et la collaboration étroite avec des chercheurs et des praticiens architectes et urbanistes. Dans le cadre de la recherche Tranche de ville : habiter Paris ou comment apprécier la qualité de la vie urbaine à Paris ?, ces choix méthodologiques nous ont permis, d’une part, de mener le travail ethnographique sur un territoire urbain physiquement et socialement vaste et, de l’autre, d’aboutir à des résultats originaux grâce, notamment, à la mise au point d’une méthode de travail interdisciplinaire dans laquelle les outils de recherche des anthropologues et des architectes urbanistes ont dialogué de manière féconde.

L’interdisciplinarité comme fil rouge dans l’histoire du LA/A

Dès sa naissance en 1984, notre équipe a été souhaitée comme un espace de recherche interdisciplinaire, la pensée architecturale étant considérée comme l’une des disciplines majeures, avec l’anthropologie, pour fonder une réflexion sur l’espace humain. Une approche interdisciplinaire y a toujours été privilégiée, tant dans la composition de l’équipe, que dans le choix des partenaires de nos collaborations scientifiques. Vingt ans après, devant l’évidence de la crise des disciplines inhérente au post-modernisme, l’interdisciplinarité nous apparaît d’autant plus comme le seul moyen épistémologique et méthodologique permettant de comprendre la complexité des sociétés contemporaines en relation avec la production de certains de ses objets, tels que l’architecture, la ville ou le paysage (de Biase et Rossi, 2003).
Nous comptons nous appuyer sur cette « tradition » notamment en plaçant l’accent sur l’intérêt méthodologique de la perspective interdisciplinaire. Les travaux de Jean-Paul Loubes sur la régularité de l’espace chinois et sur le vernaculaire contemporain menés à travers des dispositifs tels que le relevé architectural et l’enquête ethnographique, sont, dans ce sens, exemplaires.
Dans les dernières années, nous avons aussi élargi la rose des disciplines avec lesquelles dialoguer sur le plan méthodologique. Lors du colloque Identités/Territoires et lors de la préparation de l’ouvrage collectif Chez nous. Identités et territoires dans les mondes contemporains nous avons collaboré avec des géographes et des politologues. La recherche « Les temps de l’agglomération de Clichy-sous-bois - Montfermeil » a été menée en collaboration avec un économiste.

Du domaine audiovisuels, nous avons « emprunté » la technique du film documentaire – utilisée aussi bien en tant qu’instrument de collecte de données, qu’en tant que support de communication et valorisation du travail scientifique – et nous l’avons utilisé à l’occasions des recherches et des actions telles que Villes asiatiques. Expériences singulières, enjeux locaux « Perception du centre ville et de la place Napoléon par les habitants de La Roche sur Yon , De la ville réelle à la ville utopique : imaginaire urbain dans le cinéma. Dans ce dernier cas, notre démarche de connaissance de la ville contemporaine s’enrichit du regard de l’art cinématographique. Dans la recherche Paysages imaginés et paysages construits. En-quête d’un imaginaire contemporain des Alpes , ces apports audiovisuels sont accompagnés d’une attention spécifique porté au domaine sonore.

Cet axe a été mis en place dans le but de favoriser une réflexion critique et systématique sur les méthodes et sur les dispositifs d’enquête utilisés par les membres de l’équipe lors de leurs recherches. L’ensemble de l’équipe s’engage à mener ce travail aussi bien de manière rétrospective - et donc focalisée sur les recherches et les actions passées – que dans un cadre temporel work-in-progress, axé, donc, sur les méthodologies expérimentées dans les recherches en cours et dans les recherches à venir, sachant que dorénavant une attention particulière sera portée, dans chacune des nos recherche, aux dispositifs d’enquête mis en œuvre et à la possibilité de les inventer.
Les projets de recherche Les réenchantements de La Courneuve. De l’ancienne cité des 4000 sud aux futurs quartiers de la Tour et Les Clos et « Territoires vécus – territoires construits : des promenades-découverte à une cartographie sensible » constituent, dans ce sens, autant d’enjeux, certes d’ordre de contenu, mais aussi d’ordre méthodologique.

Dans le premier cas, nous nous proposons, entre autres, de construire un site web qui relate en temps réel l’avancement du travail de recherche de notre équipe. Ce choix est dicté par la volonté d’ouvrir la période de recherche à la communauté scientifique et urbaine afin de pouvoir enrichir notre investigation, et par le désir de décloisonner les temporalités de recherche qui induisent toujours un long moment de silence où le chercheur « reste seul » pour finaliser sa recherche pendant que l’interlocuteur le perd de vue en attendant « le produit terminé ». Notre volonté est aussi de comprendre comment, aujourd’hui, nous pouvons communiquer une recherche de manière « contemporaine ».
Notre intérêt est de travailler à travers un langage et des supports qui ne sont pas seulement ceux de la communauté scientifique, mais qui expérimentent aussi des parcours nouveaux de communications, interactifs et ouverts.
Ce choix est aussi justifié par l’interdisciplinarité de l’équipe de recherche, qui devra tout au long la période de recherche mettre en commun ses savoirs, construire un langage partagé, afin de sortir des frontières disciplinaires, et communiquer aux Autres (étudiants, habitants, institutions…) l’état de l’avancement.

Dans le deuxième cas, il s’agit, entre autres, de soumettre la méthode du découpage arbitraire du territoire - déjà expérimentée lors de la recherche Tranche de ville : habiter Paris ou comment apprécier la qualité de la vie urbaine à Paris ? à l’épreuve d’un espace géographique plus vaste et diversifié que celui de la ville de Paris.

Coordination : Cristina Rossi

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