Résumé
La recherche propose une lecture des enjeux que soulève la construction de l’avenir d’une métropole contemporaine – qui existe déjà dans l’espace et le temps – en travaillant la dimension de l’imaginaire et de son impact au niveau de la perception ainsi que sur la transformation « matérielle » du territoire. L’hypothèse de départ est que l’édification d’une telle métropole se produit aujourd’hui grâce aux éléments pour la plupart immatériels qui ne constituent pas des transformations de l’espace bâti. Il nous a semblé intéressant d’approfondir ces questionnements à travers une étude de cas en cours de développement – le Grand Paris – en nous interrogeant sur la définition de ses limites.
Bien que l’État ne soit pas le seul acteur à s’intéresser à la question, nous avons considéré la consultation internationale pour l’avenir de l’agglomération parisienne comme un élément de rupture dans l’histoire de la conception, de la représentation et de la transformation du territoire francilien. Elle nous semble notamment intervenir de manière très forte sur trois thèmes : l’échelle spatiale de référence, en nous invitant à voir très grand et de très haut ; l’échelle temporelle, qui donne au processus un caractère de nécessité et d’urgence ; les acteurs en jeu, en repositionnant l’État au cœur du débat. Mais ce processus, ouvert par la consultation, parvient-il à provoquer une rupture par rapport aux débats et aux projets qui, tout au cours du XXe siècle et même avant, ont interrogé le développement de Paris au-delà de ses limites administratives ?
Notre contribution analyse les différents récits qui, dans le temps, contribuent à définir les limites du territoire francilien, ainsi que les projets urbains et politiques plus récents, qui semblent dans certains cas vouloir introduire des ruptures permettant de mettre en cause une image figée qui a constamment déterminé ce qui était « au-dedans » par rapport à ce qui restait « en dehors » et loin. Toutefois, pour nous, il ne s’agit pas de repérer tous les discours et les projets qui ont construit les limites parisiennes et franciliennes, mais de les entrecroiser pour essayer de creuser ce qui se cache derrière des traces et des tracés.
D’abord présenté comme le projet qui veut imaginer la métropole du demain, le Grand Paris coïncide aujourd’hui avec une rocade métropolitaine : « grand huit », « arc express » ou « troisième voie des architectes », peu importe. Cette coïncidence est considérée depuis peu comme quelque chose d’acquis, mais comment est-on parvenu à ce résultat ? Au-delà des nombreuses critiques qui sont faites aux différents tracés proposés (moyens de financement, dispositions législatives ou zones desservies), notre contribution propose un retour en arrière. Alors que nous attendons la fin du débat et le choix d’un tracé définitif, la métropole du futur et ses limites n’ont-elles pas été déjà fondées, bien avant et au-delà de sa construction matérielle ? Quel horizon nous propose et nous impose-t-elle ?
