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Recherches

Les passagers fantômes de l’aménagement du territoire
Interstices urbains en friche & habiter furtif en Ile-de-France

2023-03-30T15:17:08Z

Ecole Doctorale : ED 286 - EHESS École des Hautes Études en Sciences Sociales.
Directeurs : Alessia de Biase, Michel Agier
Discipline : Anthropologie
Date : 2009 -2021

En Ile-de-France des citadins vivent dans des tentes ou des abris auto-construits sur les terrains temporaires et résiduels de l’aménagement du territoire, développant des solutions d’habiter résistantes, minuscules et invisibles. Leur précarité scandalise les citoyens et projette sur la scène publique le retour des bidonvilles et les imaginaires urbains qui leur sont liés. Cette réapparition à l’échelle médiatique et politique uniquement en cas de crise – expulsions massives, grand froid, incendie, surpeuplement dans l’insalubrité, misère sociale…– n’est que l’infime partie visible d’un mode d’habiter spontané souvent très furtif et disséminé sur l’ensemble de la région parisienne. À partir des espaces impensés de la planification urbaine, imprévus à l’habitation et inutilisés dans la ville officielle et normative, il s’agit d’analyser des situations d’habiter touchant aussi bien des migrants que des nationaux en des localités dispersées sur le territoire de l’Ile-de-France. Cette approche à partir des
interstices urbains en friche permet de restituer la complexité et l’hétérogénéité de ces situations liminaires mais aussi d’étudier et de comparer les différentes politiques territoriales communales et départementales, prises dans celles qui sont mises en oeuvre à l’échelle de la région et de l’Etat, qui tentent de les prévenir, de lutter contre mais aussi les produisent.

Quelles sont les articulations, les juxtapositions et les confrontations entre la ville planifiée, contrôlée et la ville vécue, indéterminée, habitées spontanément indépendamment des architectes, des urbanismes et de l’ensemble des professionnels urbains, mais dans les brèches spatio-temporelles qu’ils laissent ?
Qu’est-ce qu’habiter une ville, se fabriquer et s’imaginer un chez soi, sur des territoires mis à l’écart mais localisés en son milieu et sans avoir le droit de cité ? Qu’est-ce qu’habiter « entre » ? Que nous apprennent les représentations et les non-représentations présentes et passées sur les fondements de la volonté d’éradiquer systématiquement des habitants, sans solution de logement, qui s’installent
inéluctablement sur des terrains qui n’ont pas d’utilité dans la ville et qui sont eux aussi inéluctables à l’aménagement du territoire ? Comment re-présenter et ainsi rendre présent des habitations furtives dont la stratégie de survivance est au contraire l’invisibilité ? Que nous apprennent ces situations d’habiter sur nous et sur notre ville ?

C’est dans ces écarts, entre habiter au-dedans et habiter au-dehors, entre être dans un lieu et être représenté dans un lieu, que cette recherche propose d’explorer l’histoire au présent de la métropole parisienne.