Que signifie explorer et questionner les formes que le temps prend au présent, considéré comme un moment relationnel à partir duquel s’articulent le passé, l’actuel et l’avenir ? Comment le temps s’entrelace-t-il avec l’espace et se manifeste-t-il à travers l’expérience individuelle et collective de ceux qui habitent, projettent et transforment les lieux et les territoires ? Comment ces expériences et la trame des représentations et pratiques sur lesquelles elles s’appuient se déploient-elles au quotidien ou ouvrent sur une idée du futur ? Comment est-ce qu’elles s’accordent, disjonctent, sont impactées ou entrent en conflit avec les temporalités propres au monde (humain, animal, végétal et naturel) et aux dynamiques biophysiques qui caractérisent la Terre et son climat ? Ces différentes expériences du temps se situent à des échelles et se confrontent à des horizons spatio-temporels qui ne se superposent pas systématiquement, et dont on peut sonder les écarts et travailler les articulations. La prise en compte des tensions chronotopiques générées et leur caractérisation permettent d’identifier et de saisir les différents présents à l’œuvre, et d’en révéler l’épaisseur, les interdépendances, mais aussi les possibles variations. Car, si des régimes temporels dominants (modernité, risque, accélération, présentisme, patrimonialisation, etc.) ont marqué l’histoire de la pensée, comme celle de la ville et de l’architecture, la richesse des significations dont les expériences de l’habiter sont chargées ne s’y réduit pourtant pas, laissant entrevoir d’autres façons possibles de composer avec les temps. L’ambition est de développer des outils conceptuels et méthodologiques pour observer, décrire, interpréter et représenter la variété des logiques spatio-temporelles, souvent co-présentes, qui structurent nos existences et nos sociétés et, en même temps, résonnent historiquement avec les dynamiques des projets des lieux que l’on habite, qu’ils soient urbains ou ruraux. Dans une perspective anthropologique, il s’agit de comprendre comment nous faisons l’expérience de ces temporalités, quelles structures stables ou configurations momentanées elles dessinent, quelles valeurs nous y projetons, quels discours et quelles pratiques les accompagnent, quelles visions du monde elles induisent, quelles marges d’autonomie elles nous laissent.
Coordination : Catherine Deschamps, Alain Guez