Face à l’injonction de s’impliquer dans la fabrique de la ville, le terme “habiter” est redevenu de plus en plus fréquent dans le vocabulaire de ceux et celles qui conçoivent ou encore analysent l’urbain. En atteste les nombreuses publications qui ont vu le jour sur ce sujet depuis le milieu des années 2000 ainsi que la profusion de colloques et séminaires organisés sur ce thème. Pour autant le terme habitant est rarement interrogé et semble implicite. Mais qui est considéré comme « habitant » et par qui ? Une des premières volonté de ce chantier est donc de chercher à comprendre comment la question de l’habitant est abordée par les concepteurs (architectes, urbanistes, paysagistes) et les chercheurs au moment de penser ou de projeter la transformation urbaine.
Fort des acquis de l’anthropologie de l’habitat et des modes d’habiter, de l’anthropologie de l’espace ou des territoires qui se sont développés dans les écoles d’architecture françaises -particulièrement à Paris La Villette, au sein du LAA- nous souhaitons revisiter ces manières de faire pour voir comment elles peuvent être réinvesties et réactualisées dans la compréhension de l’habiter contemporain en mettant l’accent sur les processus de la transformation urbaine.
Ce chantier souhaite également interroger les postures de ceux et de celles qui sont dénommé·es « habitant·es » et d’interroger leur(s) rôle(s) dans les processus de transformations urbaines. Si certaines approches de la ville tendent à les présenter comme une entité homogène, en taisant les différences et les inégalités, notre démarche met en avant la pluralité des figures qu’implique le vocable d’habitant·e. En concrétisant son profil, il et elle deviennent des sujets vivants, singuliers. Nous interrogeons alors la manière dont les inégalités sociales peuvent devenir matrices et effets des liens privilégiés que des personnes établissent à un ou des espace(s). Quel type d’acteur est-on là où on habite ? Qu’est-ce qu’on habite ? Avec l’apparition puis la profusion des outils numériques, un nouveau type d’espace est apparu : le « on-line » dont le pendant est le hors-ligne (« off-ligne »). Comment on-line et off-line interagissent sur l’habitant·et comment celui-ci ou celles-ci agit sur/dans ces espaces ? Le numérique est-il habitable ?
Finalement, si l’habiter peut être considéré comme un réseau ou nœud de liens spécifiques avec un/des lieu/x, les temporalités importent dans la compréhension du phénomène : l’enfant n’est pas le même habitant que la personne du 3e ou 4e âge. Il est donc essentiel d’explorer le temps long de l’histoire, mais également les âges et les moments de la vie. Comment alors articuler les dimensions temporelles avec les dimensions spatiales dans l’analyse de la figure de l’habitant pour la compréhension de nos milieux de vie en perpétuelle transformation ?
Coordination : Ferdinando Fava, Nadja Monnet